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LE COLLEGE RECRUTE

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EXPOSITION SUR LA GUERRE 14/18

Dans le cadre de notre parcours citoyen, tous nos élèves des classes de 3ème participent comme chaque année aux différentes commémorations.

 

Ce vendredi 10 novembre 2017 de 10h00 à 11h00, une cérémonie du 11 novembre a été organisée au collège.

 

L’exposition sur la guerre 14/18 dans la salle Portal à Sainte Maxime complète le travail de mémoire de nos élèves.

 

Parourez les photos en cliquant sur celle-ci.

 

 

 

Commémoration du 8 mai

Lundi 9 mai, à 13h, les élèves des classes de Troisième du collège Berty Albrecht s'étaient rassemblés dans l'atrium afin de commémorer le 8 mai 1945. Cette date symbolique marque en effet la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe. Mais elle symbolise aussi, et surtout, la victoire de la démocratie et des libertés sur les dictatures fascistes.

Ainsi, les élèves ont chanté les hymnes anglais et français, ainsi que le Chant des Partisans, véritable hymne de la Résistance. Ce travail a été mené sous la direction de Mme Sandrine Bauduin (enseignante d'éducation musicale) et Mme Nathalie Gombart (enseignante d'Anglais). D’autres élèves ont également lu des textes afin de ne pas oublier cette date qui a marqué l’Histoire, et qui contribue pleinement aujourd'hui à l'engagement civique de nos futurs citoyens.

Etaient d'ailleurs présents à cette cérémonie M. Alain Prato (enseignant d'Histoire retraité, porteur du devoir de mémoire), M. Girard pour représenter la Mairie de Sainte-Maxime, ainsi que les représentants d'associations patriotiques locales : M. Paul Delestrade (UNC), M. Roger Elizabé (FNACA), Monsieur le porte-drapeau du Souvenir Français (pour représenter M. François Chartron en convalescence), tous accueillis par notre chef d'établissement, Mme Carle.

Cette cérémonie complète donc celle du 11 novembre et rappelle aux élèves le sens fondamental que doit porter le travail de mémoire, surtout dans le cadre de leur parcours citoyen…

M. Chaabani

 

 

 

 

 

Cérémonie de commémoration du 8 mai

 

 

 

 

Hommage aux victimes de l’attentat de Charlie Hebdo

Sous l’impulsion d’un groupe de professeurs, dont Mme Delongeas, et dans le cadre du CESC (Comité d’Education à la Santé et à la Citoyenneté), les élèves et le personnel du collège Berty Albrecht ont réalisé une performance artistique le vendredi 16 janvier à 10h30, en mémoire des attentats de la semaine précédente.

Les élèves se sont réunis en silence dans la cours et ont brandi au-dessus de leur tête un message ou un dessin personnel exprimant leurs sentiments. Ils ont ainsi rendu hommage aux victimes et aux Valeurs de la République : Liberté, Egalité, Fraternité et Laïcité.

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Cérémonie du 11 novembre : travail de mémoire

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Première commémoration du 11 novembre au sein du collège Berty Albrecht, devant l’auditorium SERGE SCHNEIDER. (Mme CARLE, Principale, Mr PRATO, enseignant d’Histoire àla retraite).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Puis le lendemain, le 11 novembre, lors de la cérémonie organisée par la mairie de Sainte-Maxime.

Julia CHAILLET, Maxime DI MASCIO et Inès HARSCH (3A) puis Tom BORING, TINELLI Carla et Kiarra VALENTE (3D) ont lu des textes sur la Première guerre mondiale, qu’ils avaient rédigés eux-mêmes, sous la direction de leur professeur d’Histoire, Mr CHAABANI.

Ce travail de mémoire s’inscrit depuis plus de 25 ans dans le patrimoine de notre établissement. Il avait étélancépar Mr Alain PRATO, qui a transmis le flambeau àMr CHAABANI en 2008.

Nous félicitons tous les élèves qui ont écrit ou lu les textes sur la Grande Guerre.

Prochaine étape: le 8 mai 2015 pour la commémoration de la capitulation allemande (70°anniversaire)…

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Carla TINELLI (3D) lit son texte, entourée des porte-drapeaux, lors de la cérémonie commémorative organisée par la municipalitéde Sainte-Maxime, devant le Monument aux Morts.

 

 

 

 

 

 

 

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Mme CARLE, Principale du Collège, les élèves de 3°qui ont lu leurs discours, Mr CHAABANI, professeur d’Histoire référent Citoyennetéet Mémoire, CASU Sathyne, élève de 6°, membre du Conseil Municipal des Enfants, qui a participéau dépôt de gerbes, devant le Monument aux Morts de la commune de Sainte-Maxime.

 

 

 

M.Chaabani

 

Parcours de Serge Schneider, ancien déporté

PARCOURS D’UN JEUNE HOMME

EN PARTICULIER, PERIODE DE LA GUERRE MONDIALE 1939-1945

Matricule 59374

 

 

Schneider Serge né le 25 juillet 1924 à Montois, département de Moselle.

 J’ai habité de 1927 à 1976 à Auboué en Meurthe et Moselle. A six  ans, je rentre à l’école primaire de la ville et y effectue une scolarité normale jusqu’au Premier Ordre. A quatorze ans, le 1er août 1938, je rentre en apprentissage à l’usine locale de métallurgie, filiale de Pont-à-Mousson, comme mécano électricien. Mes parents, faute de moyens, n’ont pu me faire continuer les études ; contrairement à l’avis de monsieur DOUCHET, alors directeur de l’école qui aurait désiré me voir poursuivre mes études. En effet, mon rêve était de devenir médecin.

En 1936 il est créé, en France, une organisation pour les jeunes, qui s’appelle « l’Enfance Ouvrière ». J’y adhère dès la première heure. C’est là que je pratiquerai des activités de plein air et de gymnastique, j’y apprendrai à vivre en collectivité. Nous faisions des sorties de groupes accompagnés d’adultes mais surtout accompagnés de notre moniteur de gymnastique, Monsieur Rosenbaum que nous appréciions tous. Grâce à lui nous allions à de nombreuses fêtes champêtres dans toute la région.

 

A mon entrée en apprentissage,  début août 1938, j’adhère aux jeunesses communistes.

Le 30 novembre de la même année, il y eut une grève à l’usine d’Auboué. Mon père qui était secrétaire C.G.T.de l’entreprise fut licencié. Sans travail et n’en trouvant pas, il prit en avril 1939, une gérance de Bar Dancing Restaurant dans la localité.

En ce qui me concerne, mon contrat d’apprentissage à l’usine était d’un an. Une fois l’année écoulée, celui-ci ne fut pas renouvelé, .Juillet 1939 voyait mon licenciement, alors qu’il était rare qu’un jeune apprenti ne puisse aller jusqu’à la fin de l’apprentissage et passer le C.A.P.

Au moment de la débâcle et l’annexion de l’Alsace et la Lorraine, en juin 1940, nous sommes restés à Auboué, dans la zone rouge à quelques kilomètres de la frontière. Les premiers prisonniers de guerre évadés sont passés par notre maison, ont eu nourriture et habits. Par la suite il a fallut faire appel à d’autres personnes. Lorsque les gens sont revenus de l’exode, papa a contacté un boulanger d’Auboué, Monsieur Adam qui fut d’accord pour aider en habits et en pain. Cette aide était une bonne chose, nous n’avions plus les moyens. Depuis 1940 je travaillais dans une brasserie à Homécourt, la commune limitrophe, jusqu’en fin 1941.

 

En juin 1941, maman est décédée. Un accident en 1932 je crois, lui a provoqué une paralysie d’une jambe puis cela a progressé.

La Résistance :

C’est à partir d’avril ou mai 1941 que nous avons commencé à nous réunir. J’ai été recruté par Roger Henry, monteur en charpente métallique qui était en charge d’organiser les groupes de jeunes. En plus de la distribution de tracts, notre première action contre l’occupant fut de lancer sur les lignes électriques, dans la nuit du 13 au 14 juillet 1941, des petits drapeaux tricolores confectionnés par d’autres personnes. C’est ensuite qu’il a été constitué des groupes de trois, dont toutes les réunions se passaient dans notre café.

Je suis devenu chef de groupe, notre mission était surtout, hormis des inscriptions sur les murs la distribution de tracts. Il nous est arrivé une fois, en les mettant sous les portes, après le couvre feu, de tomber sur une patrouille de gendarmes français qui nous a poursuivie ; nous avons eu le temps, avec mes deux camarades de dévaler le ravin qui conduisait à la rivière, ils ont tiré plusieurs coups de feu dans notre direction sans nous atteindre,.

Une autre fois, avec Jean Pacci notre responsable de secteur, je suis allé à 12 kilomètres de là, à Jarny à bicyclette, chercher des armes. A notre retour, devant notre café les gendarmes nous ont demandé ce que nous avions dans les paniers, le camarade a répondu :

 «  Du beurre», ils nous ont laissé passer, pensant certainement a une blague, ou peut-être trafiquait-il déjà avec eux, puisse qu’une fois il a été arrêté par les gendarmes et se serait évadé ? Par la suite c’est lui qui sous la torture a donné tout le réseau, treize ont été fusillés dont lui même.

Le plus difficile était d’inscrire les mots d’ordre sur les murs pour deux raisons, la première était que le quartier habité à 90% de français nous exposait aux dénonciations et la seconde était que la gendarmerie y faisait beaucoup de rondes, ceci explique peut-être cela.

Depuis mars 1940 je travaillais dans une brasserie d’une localité voisine jusqu’en décembre 1941. Il a fallut que je prenne des leçons de conduite avec un chauffeur expérimenté, puis que le patron, ayant son permis ne pouvait plus conduire (il avait perdu un œil dans une bagarre). L’entreprise disposait d’une camionnette de 3500 kg ce qui m’a permis de conduire le véhicule mais toujours accompagné. Après la fermeture de cette entreprise je devais donc chercher autre chose, cela a été très difficile. C’est à l’usine d’Homécourt que j’ai pu commencer le 5 février 1942.

Mon arrestation

 Le premier jour de mon nouvel emploi, en rentrant à 17h00 deux camarades (Maurice Froment et René Favro) m’interpellent pour m’annoncer qu’il y avait eu sabotage du transformateur à l’usine d’Auboué par un groupe de nos camarades. Nous avons discuté quelques minutes puis rapidement, la maison fut cernée par la gendarmerie française et la police secrète. Ils ont envahi notre café, personne ne devait bouger, perquisition dans toutes les pièces. Malheureusement ils ont trouvé dans ma chambre un paquet de tracts, un camarade n’était pas venu chercher le paquet deux jours avant. Etant encore à table avec mes deux camarades, nous avons été emmenés tous les trois dans la prison de la gendarmerie d’Auboué, puis le lendemain avons été transférés à la prison de Briey. Encore aujourd’hui je me souviens de ce premier repas en prison, le rationnement avait obligé la femme de Maurice à nous cuisiné du chat.

 

Le 7 février un car nous attendait à la porte de la prison de Briey avec 16 camarades, dont mon père qui avaient été arrêté le matin. Une douzaine de « feldgendarmes » nous entouraient pour nous conduire à la prison de Nancy. Mon père fut mis directement au secret, le reste de la troupe a été séparé en deux groupes pour occuper deux cellules.     .

Quelques jours plus tard d’autres furent arrêtés avec plusieurs personnalités, celles-ci ont été vite relâchées. En tout, 72 personnes furent arrêtées jusqu’au mois de juillet 1942 et l’ensemble du réseau fut démantelé.

 

Une semaine après je fus conduit à la kommandantur, interrogatoire musclé, ils voulaient savoir à qui était destiné le paquet de tracts qui avait été trouvé dans ma chambre, je n’ai jamais parlé, mais je revenais dans la cellule le visage en sang. C’est mon camarade Maurice qui m’avait pris sous son aile et me soignait, et cela à plusieurs reprises. Le 3  Mars 1942, avec 18 camarades dont mon père que j’ai retrouvé ce jour là, nous avons été conduits à la gare de Nancy sous les crachats de la foule qui faisait la haie, en nous traitant de terroristes. C’est à ce moment là que les allemands nous ont dit que si les saboteurs du transformateur n’étaient pas trouvés nous serions fusillés.

Partis de Nancy le 3 mars nous sommes arrivés à la gare de Compiègne et conduit au camp de Royallieu dans la soirée. Le lendemain à 17h 00 appel. Plusieurs codétenus sont appelés et emmenés, c’est à ce moment là que des camarades entonnent la Marseillaise qui est reprise en cœur par l’ensemble des détenus, quel frisson nous parcourt, ce chant que tous les révoltés chanteront au cours de notre calvaire… Nous apprendrons par le responsable du camp que les camarades qui l’avaient chantée ont été fusillés le lendemain à l’aube. A ceux que les allemands n’avaient rien dit, le lendemain nous étions informés que pendant un mois nous serions privés de colis pour ceux qui pouvaient en recevoir. Nous subissions également les corvées, plusieurs appels dans la journée. Dès que nous sommes arrivés nous avons été pris en charge par des camarades, personnellement je n’avais pas 18 ans j’ai bénéficié d’une soupe supplémentaire et d’une ration de pain que je partageais avec papa et mes camarades, après quelques jours au camp les groupes de résistants ont été formé par notre camarade Camille Thouvenin et chaque jour nous faisions de la gymnastique, de l’entraînement militaire en prévision d’un futur débarquement.

 C’est dans le courant d’avril que je suis appelé au bureau, un peu étonné je m’y suis rendu avec papa, lui est resté devant la porte, a l’intérieur se trouvait un S.S., de nouveau interrogatoire sur les tracts trouvé dans ma chambre, j’ai toujours répondu de la même façon que je ne connaissais pas la personne qui devait venir chercher le paquet, a la fin de cet interrogatoire, il me demande pourquoi je m’appelle Serge, « Serge, c’est un nom russe ! » j’ai répondu que je ne savais pas, il m’est arrivé son poing sur le nez que mon sang a pissé… Papa qui avait vu a travers la vitre a voulu bondir mais le garde allemand qui était devant la porte l’en a empêché, baïonnette au canon. (Je l’ai su après par mon père).Par la suite je n’ai plus été interrogé.

La vie au camp a continué, entraînement tous les jours, puis le 5 Mai 1942, à l’appel du soir je suis convoqué et invité à prendre mes affaires pour partir vers une destination inconnue. Le responsable du camp, Georges Cogniot est venu me voir, tout en préparant mes affaires m’a demandé pourquoi j’avais été arrêté, que faisait mon père. Je lui ai expliqué, il m’a souhaité beaucoup de courage et donné un paquet de cigarettes, après son départ je l’ai donné à  papa qui était très malheureux, ne sachant ce qu’il m’arrivait. Lorsque l’appel a été fini, deux allemands sont venus me chercher, j’ai été conduit dans une baraque pas loin de la sortie du camp, je n’ai pas eu de soupe…, A l’intérieur, en revanche, des noms gravés sur les murs et des inscriptions, comme « nous allons mourir demain pour la liberté », « mort à Hitler », « Pétain collabo ». La nuit m’a fait réfléchir pensant que moi aussi demain j’allais mourir… Le reste de la nuit je n’ai pensé qu’a cela.

 Mon jugement au tribunal d’Amiens et la vie au camp de Royallieu

Le lendemain matin, le jour n’était pas encore levé lorsqu’un feldgendarme est venu me chercher. Il m’a mis les menottes, nous sommes passé au bureau des entrées, j’ai été rayé des effectifs, puis nous sommes partis a pieds jusqu’à la gare de Compiègne, je me suis retrouvé à celle d’Amiens et dirigé au tribunal devant des officiers allemands cela a duré un quart d’heure environ et je fus condamné à 3 mois de prison. Lors de l’annonce du verdict, le président, je suppose puisqu’il occupait le fauteuil central, a posé la question par l’intermédiaire de l’interprète, et m’a demandé si j’avais quelque chose à ajouter ? J’ai répondu que c’était beaucoup, alors tout en riant il a descendu la peine à 6 semaines, en disant que c’était  «ganz egal», bien la même chose…, je n’ai pas compris.

Le soir même je suis revenu au camp, cela se passait le 6 mai 1942. Je n’étais pas passé au bureau des entrées, je saurai plus tard que je ne faisais plus parti de l’effectif… D’ailleurs lors du convoi du 6 juillet, premier convoi politique français pour Auschwitz, mon père et tous mes camarades arrêté les 5 et 7 février sont emmenés, sauf moi. Pas un seul n’est revenu.

Le lendemain (le 7   ou le 8 juillet 1942 ?), les camarades de Meurthe et Moselle, qui n’étaient pas partis m’ont fait venir dans leur bloc, le N°4. Certains travaillaient en cuisine. Pour moi, qui depuis le 6 mai n’avais eu aucun colis c’était bien. Les camarades ont fait le maximum pour ramener le soir, après leur travail, de la nourriture qu’ils volaient au magasin.

 Entre temps dans la nuit du 21 au 22 juin plusieurs camarades se sont évadés par un tunnel qu’ils avaient creusé avec des mineurs de Meurthe et Moselle parmi les évadés, notre chef de camp, Georges Cogniot. Plusieurs ont été repris et fusillés.

 J’ai appris que je ne faisais plus parti des effectifs par les camarades qui travaillaient « aux colis », il y en avait un qui était arrivé à mon nom, mais les camarades l’avaient remarqué, par la suite ayant fait la démarche près du nouveau chef de camp j’ai du faire une déclaration sur l’honneur comme quoi j’étais bien au camp. Par la suite j’ai appris que c’était une tante qui habitait près de Dijon qui était venue m’apporter le colis.  

 Officiellement réintégré au camp, début décembre 1942, je suis emmené à la prison de Compiègne pour faire les six semaines de prison, a mon retour quelques jours plus tard un convoi sera organisé pour une déportation au camp de concentration de Sachsenhausen-Oranienburg le 23 janvier 1943.

 

La déportation

Nous sommes parqués dans des wagons a bestiaux très tassés avec une tinette au milieu, c’est un transport très dur, il fait froid, nous avons soif, à une petite lucarne nous récupérons les glaçons qui pendent, malheureusement il n’y en aura pas pour tout le monde, c’est notre camarade GERARD qui convaincra les camarades qu’il faut les laisser pour les plus jeunes, tout le monde a approuvé, en route il a été permis de prendre de l’eau dans une gare allemande.

A notre arrivée à Saxo le 25 janvier 1943, c’est a la chlague que nous sommes évacués des wagons plusieurs camarades seront blessés à la tête, à notre arrivé au camp nous passerons à la désinfection, rasés de la tête aux pieds, puis habillés en tenue de bagnard, à la sortie il fallait s’appeler par les noms, il était impossible de se reconnaître.

Ensuite nous avons subi la quarantaine, cela sera la vraie vie de bagnard, nous sommes au bloc 37 et 38, les responsables sont des droits commun, nous nous couchons très tard, dans la nuit ont nous fait levé pour un appel, nous avons de la neige dans nos sabots, la journée nous en faisons également plusieurs, a chaque fois nous devons laisser nos sacs de provisions sur les tables, les français ne sont pas très obéissants mais nos « bandits »  veillent et c’est des coups qui pleuvent, au bout de deux jours nous n’avons plus rien dans nos petits sacs, mais pendant un mois nous subirons les quatre volontés de ces « bandits ».

 Après discutions avec les camarades nous décidons de ne pas travaillez en usine, nous nous déclarons : travailleurs du bâtiment. Au bout du mois nous seront affectés dans les commandos a creuser des tranchées nous y resterons environ deux mois, pendant ce temps plusieurs camarades mourrons des coups. Personne ne pensait que ce travail soit si dur avec si peu de nourriture.

Nous ne savons pas pourquoi, ceux qui en France travaillaient dans des usines, nous nous sommes retrouvés a travaillé au hall 3 de l’usine Heinkel qui était la fabrication d’avions du même nom. L’avantage nous étions à l’abri, mais il fallait produire.

Personnellement je travaillais à la colonne 5 qui était la soudure. Il va falloir apprendre, mon camarade Raymond Faitivau m’aidera dans cet apprentissage, dans cette colonne nous ne serons pas battus mais par contre nous ferons une semaine de jour, la suivante de nuit, elle était épuisante, le froid, le sommeil. Nous quittions notre travail à la dernière minute pour l’appel, du lundi au samedi, la semaine où nous faisions la nuit, nous finissions le dimanche matin. Le travail de nuit était difficile, nous dormions très peu, après ce qui était appelé le café nous nous couchions jusqu’à midi et demi, ensuite c’était les corvées, soit ramasser les papiers dans le camp soit le dépouillage, mais pour l’appel du soir nous étions les premiers sur la place d’appel.  

Le dimanche matin était en général un appel sans fin, qu’il pleuve qu’il vente ou qu’il gèle à plusieurs reprises nous étions comptés et recomptés, c’est dans ces moments là que beaucoup de camarades s’effondraient et étaient emmenés au four crématoire même s’ils bougeaient plus ou moins, je l’ai vu de mes yeux, dans la charrette ça remuait.

C’est au début septembre que je suis appelé au commandant, il m’a montré une pièce que je faisais à la colonne de la soudure, elle consistait à soutenir les ailes de l’avion heinkel qui avait quatre œillets que je devais souder et mettre mon numéro 54, le commandant qui parlait français m’a accusé de sabotage, j’ai nié en expliquant que je n’étais pas professionnel, il m’a condamné à deux semaines de commando disciplinaire.

Cela a été deux semaines très difficile, heureusement la solidarité a marché en plein, le soir j’ai toujours eu soit de la soupe en supplément ou du pain en alternance ; a ce commando nous avions un sac sur le dos de environ quinze t kilos avec un changement de chaussures chaque jour, le circuit, nous étions au camp central, se faisait au tour de la place d’appel avec des passages d’une dizaine de maîtres, soit de pierres, soit de sable, soit d’eau, celui qui commandait ne permettait pas que l’on traîne, sinon c’était les coups.

En janvier 1945 je travaillais au hall 8 à faire des cylindres pour gazogène, en triant les tôles pour rechercher le calibre celles ci me sont tombées sur la jambe droite, j’ai été emmené au revier puis a Sachso, le Docteur Coudert m’a annoncé plusieurs jours après que j’avais une fracture de la rotule et que j’en avais pour un moment, j’ai eu un plâtre sur toute la jambe, ensuite j ai eu un second qui me tenait uniquement le genoux, il m’a été enlevé quelques jours avant l’évacuation, mais je boitais beaucoup, cela a duré des mois.

Je n’oublierai jamais la solidarité qui m’a permis de sortir de cet enfer, je le dois beaucoup à mon camarade Charles DESIRAT, c’est lui encore pour la première journée d’évacuation m’aidera à finir la marche de la mort.

 Malheureusement après cette première journée de marche je n’en pouvais plus, la nuit nous avons dormis sur une place sous la pluie, le lendemain nous étions cinq a ne plus pouvoir marcher, les S.S. nous ont fait rentrer dans une grange qui se trouvait tout prêt et nous avons attendu, nous avions peur sachant que dans la première journée plusieurs camarades qui ne pouvaient pas suivre avaient eu une balle dans la tête, dans l’état ou nous étions nous ne pouvions aller plus loin, mais la chance était avec nous, après l’évacuation de tous nos camarades déportés un soldat allemand est venu dans la grange, quelle surprise Hans était un ancien détenu qui avait travaillé avec moi à la colonne 5, nous nous sommes serré la main et tout de suite nous a dit «  vous cinq pas fusillés prison » c’est comme cela que nous avons échappés et mis a la prison de Neuruppin, là le Directeur nous a fait un discours, que nous serions bien nourris, effectivement jusqu’au 30 avril midi nous avions eu suffisamment a manger, ce jour là ce même directeur nous a dit que la guerre était finie, nous a proposé les directions où était les alliés, tous les cinq nous sommes partis, lorsque nous sommes arrivés au premier village il faisait nuit, le premier coin que nous avons trouvés pour dormir nous y sommes restés. C’est le lendemain lorsque nous nous sommes réveillés nous étions saouls, nous avions dormis dans une distillerie. Nous avons vite repris nos esprits, des soldats soviétiques étaient dans ce petit village. Nous étions libres mais pas au bout de nos peines, nous étions le 1er Mai, le 10 nous avons été évacués en zone britannique là il a fallu chercher sa nourriture dans les maisons détruites de Magdeburg et pour revenir en France nous avons refusés d’être mis dans des wagons a bestiaux, nous avons eu le lendemain des wagons de troisième classe. Nous sommes  passés par la Hollande, la Belgique, avons été démobilisés à Hirson puis Paris où j’ai dormi chez mon camarade Pierre Gouffaut, le lendemain j’ai pris le train en première mais dans le couloir jusqu’à Briey et six kilomètre a pied jusqu’à Auboué malgré mon boitillement.

Enfin je retrouvais mon village après quarante mois d’absence jour pour jour.

Ce cauchemar a duré 27 mois en camp de concentration. A mon retour j’ai fait dix huit mois de Sanatorium. Je n’ai pu  reprendre une vie professionnelle qu’en 1952.

 

Janine Blum, déportée à Auschwitz Birkenau

Témoignage de Janine Blum 

             Je suis née à Belfort en 1927 dans une famille juive de nationalité française.

Mes grands-parents nés en Alsace avaient après la défaite de 1870 fait le choix de s’installer en France. Belfort et son territoire étaient très proches de leur province natale.

            Jusqu’à la veille de la Seconde Guerre mondiale, ma vie était très heureuse entre ma maman, mon papa et ma sœur plus jeune de 15 mois Mado. Pourtant mes parents étaient très inquiets par l’arrivée d’Hitler au pouvoir en Allemagne en 1933. Ils suivaient avec angoisse la mise à l’écart des Juifs dans ce pays, leur expulsion massive après la nuit de cristal en novembre 1938. Ils redoutaient par dessus tout, une guerre entre notre pays, la France, et l’Allemagne nazie.

            A la déclaration de la guerre la 1er septembre 1939, nous nous trouvons en Bretagne à Dinard. Nous y sommes en vacances avec ma sœur, ma famille et une tante dans une maison louée. Ce furent les dernières heureuses mais nous ne savions pas qu’elles étaient les dernières.

            La défaite des armées françaises en juin 1940 était accompagnée de toutes sortes de fausses nouvelles dont celle qu’il fallait franchir la Loire pour se mettre à l’abri de l’invasion qui serait stoppée sur le fleuve par l’armée française.

            Mon papa prit la décision de nous éloigner le plus possible de l’ennemi. Il prit le volant d’une traction avant Citroën. Nous y étions 8 à l’intérieur le jour du départ de Dinan le 13 juin 1940. Nous nous sommes retrouvés dans toute cette foule de fuyards dans le désordre de l’exode. Nous avons fini par atteindre Pau où une de mes tantes prit la direction du Maroc et une autre put avoir un visa pour le Portugal. Nous sommes restés en France et avons entamé un périple de cinq déménagements pour fuir les Allemands et les lois antisémites de Pétain.

            Après Pau nous avons gagné Mazamet ensuite Béziers pour être plus en sécurité notre père choisit de s’installer dans un petit village de l’Aveyron : Saint Geniez d’Olt.

            Je dois dire que tous ces déménagements m’avaient perturbée. J’avais redoublé une classe et je me retrouvais dans la même classe que ma sœur

            Pendant l’été 1942, nous avions quitté Béziers à cause de la chaleur pour la montagne. C’est à ce moment que j’ai assisté à l’arrestation de Juifs étrangers. Ils sont restés parqués dans un jardin face à notre immeuble. Ils me faisaient pitié ! Avoir fui la Pologne, l’Allemagne pour espérer vivre libres en France et être arrêtés ! J’en étais bouleversée : ces images me poursuivaient toujours.

            Je dois préciser que malgré les lois de Vichy qui avaient obligé les Juifs à se faire inscrire sur les registres de police ou de gendarmerie dans la zone occupée mon père ne le fit pas . De sorte que nous n’avons pas porté l’étoile.

            Nous sommes restés à Saint Geniez d’Olt toute le fin de l’année1942 et jusqu’à la rentrée d’octobre 1943. J’avais 16 ans et Mado, 15 ans. C’était l’année du bac (à cette époque en deux parties). Il n’y avait pas de lycée à Saint Geniez d’Olt. Aussi mes parents nous ont placées en internat au lycée de Rodez toutes les deux sous notre nom. Toujours à cause du bac, papa ne voulait pas que nous le passions avec le nom que nous avions sur nos faux papiers. Il craignait pour la suite les difficultés à nous faire réinscrire sous notre vrai nom.

            L’émotion m’étreint encore, je suis obligée d’écrire, les mots me manquent… Ils ont informé la directrice que nous avions aussi de fausses cartes d’identité en cas de rafle en lui faisant de très nombreuses recommandations pour les utiliser en cas de besoin. Ce qu’ils ne savaient pas hélas ! Cette directrice avait un  mari  Milicien ! Il y avait d’autres jeunes filles juives dans le lycée mais nous restions discrètes.

            J’ai appris plus tard que dans le lycée de garçons jouxtant celui des filles, se trouvait Francis Levy sous son nom de Levy, belfortain d’origine et ami de toujours. Il n’a pas été inquiété.

 

ARRESTATION

 

Le 22 avril 1944, nous étions dans le cours d’anglais. La surveillante générale est entrée. Elle nous a demandé de la suivre dans le bureau de la directrice. Nous avons pensé avec ma sœur qu’il était arrivé quelque chose à nos parents. Je n’oublierai jamais le regard de notre professeur quand nous sommes passées devant elle pour sortir. Savait-elle quelque chose ?

Dans le bureau, il y avait là deux hommes, le chapeau mou et l’imperméable habituel de la Gestapo, certifiant à la directrice que c’était un contrôle et que nous reviendrions bientôt… Nous savions ce que cela signifiait ! Pourquoi ? 

Mon oncle avait été pris lors de la rafle du Vel d’Hiv à Paris en juillet 1942. Déporté et depuis nous n’avions plus de nouvelles. Ma cousine Denise, 23 ans, membre de l’OSE ‘ Organisation de Secours aux Enfants, convoyait des enfants Juifs pour les mettre à l’abri en Suisse. Elle avait été arrêtée dans le train et depuis nous étions aussi sans nouvelles. J’ai appris plus tard qu’elle avait été enfermée à la prison de Montluc à Lyon et torturée. Mon cousin Pierre, 24 ans, pupille de la Nation, lui aussi avait été arrêté et nous n’avions plus de nouvelles.

J’avais dons la hantise d’être arrêtée. Maintenant que c’était arrivé, j’étais comme soulagé. Il allait falloir faire face !

La directrice fit venir l’économe avec mission de nous suivre au dortoir sans nous lâcher, pour faire nos valise. J’ai pris l’argent que nous avaient laissé nos parents au cas où ils soient arrêtés, que nous ayons de quoi vivre. Puis nous sommes descendues. Avions-nous été dénoncées ? Je ne peux pas l’affirmer.

Toujours est-il que nous nous sommes retrouvées dans la Traction Avant Citroën de la Gestapo et menées en prison à Rodez dans une caserne. Il y avait dans une pièce déjà une dizaine de femmes arrêtées la nuit dont trois camarades éclaireuse : Maki, Huguette et Gertrude. Nous ne nous sommes plus quittées. Pour nous donner du courage, nous chantions des chansons scoutes. Le chant nous faisait oublier notre sort. Un soldat allemand gardait la porte. Il n’y avait pas d’eau courante dans la pièce. Un verre d’eau pour la toilette et nous laver les dents ! Pas de WC seulement un seau pour toutes ! La Croix Rouge nous apportait nos repas deux fois par jour mais en les passants par une fenêtre.

Le mari d’une femme non-juive arrêtée est venu la voir en accompagnant la Croix Rouge. J’en ai profité pour lui remettre une enveloppe avec l’argent que nous avions sur nous pour mes parents, pensant que nous n’en aurions plus besoin.

Nous pensions à nos parents. Seraient-ils aussi arrêtés ? Je n’ai su qu’à mon retour que notre correspondant alsacien de Rodez, professeur de philo au lycée de garçons, avait bondi sur son vélo pour faire les 35 km jusqu’à Saint Geniez d’Olt Il les prévint et les conduisit de force chez des paysans dans la montagne au péril de sa vie. Une demi-heure après leur départ la Gestapo était chez mes parents …

Maki arrêtée avec son père se faisait du souci pour sa mère et son frère : où étaient-ils ? Nous en étions au même point avec nos parents dont nous n’avions pas de nouvelles. Nous sommes restés quelques jours dans la caserne devenue une prison. Le temps nous semblait long.

DRANCY

 

Nous avons été transférées de Rodez à Drancy en wagons de voyageurs avec changement à Toulouse. Lors de l’arrêt les Allemands nous ont tout de suite mises à l’aise en nous prévenant que si l’un de nous s’échappait, ils abattraient quelqu’un du groupe. C’était le mois de mai 1944, nous regardions à travers les vitres du wagon les arbres en fleurs que nous ne verrions pas de sitôt hélas !

Arrivées à Paris, les fameux bus parisiens avec plateforme arrière nous attendaient pour nous conduire à Drancy (des anciennes Habitations Bon Marché ancêtres de nos HLM transformés en camp de transit pour les Juifs avant la déportation). Là nous avons été dépouillées de nos derniers petits bijoux et de l’argent que nous pouvions encore avoir sur nous. Nous n’avions plus rien que notre petite valise ! La première douche commune avec des femmes âgées au corps déformé par les grossesses fut un moment pénible. L’époque était prude, la nudité toujours cachée. Aussi je n’oublierai jamais ces pauvres femmes qui se cachaient de nous !

Combien de temps resterions- nous à Drancy ? Une semaine au plus nous disait-on. Et ensuite où irions-nous ? A Pitchipoï ! Nul ne pouvait le dire. Il y aurait des transports d’hommes pour les mines de sel ou bien pour l’organisation Todt sur la Baltique, entendions-nous. Alors Pitchipoï était le terme employé pour cette destination inconnue. Sa traduction exacte veut dire « nulle part ! »

Le 19 mai 1944, le départ pour Pitchipoï est annoncé pour le lendemain. Le 20 mai nous sommes rangées par 5 et avec un grand pain et départ pour la gare de Bobigny. Les wagons à bestiaux nous attendent sur un quai à part. Il faut faire vite, les Allemands nous bousculent pour grimper dans les wagons  «  40 hommes 8 chevaux ». Nous allons nous y retrouver à 80 au moins sans pouvoir nous étendre, sans eau. Un seau «  une tinette » pour nos besoins, qui débordait sur ceux qui étaient à côté. Ce n’était pas la place rêvée ! Il s’agit du convoi 74 : 1200 personnes, 904 gazés à l’arrivée, 188 hommes sélectionnés et 108 femmes pour entrer dans le camp. 157 survivants en 1945 dont 108 femmes.

Une puanteur se dégageait : hommes, femmes, vieillards, enfants pêlemêle. Nous avons eu le reflexe de nous coller à la paroi du wagon. Nous pouvions nous y adosser et respirer un peu à travers les planches disjointes. Nous ne savions pas où nous allions. A chaque arrêt, nous essayons de distinguer où nous sommes. Je me rappelle avoir pu lire « Château Thierry », ensuite plus rien.

 

AUSCHWITZ BIRKENAU

 

On nous fait descendre sur le quai «  la rampe » à coups de bâtons. Nous devons abandonner nos valises. Nous sommes le 23 mai 1944 au matin. Des hommes en rayées «  des détenus » montaient dans le wagon pour s’occuper de nos valises. Ils nous faisaient sortir en vitesse. Ils n’avaient pas le droit de nous parler. Sur le quai : des SS avec leurs chiens. Il était de bonne heure. Il faisait encore froid. Sur le quai, c’était la foire. Un homme en rayé nous chuchota «  Allez à gauche ! » Nous étions les 5 ensembles. Un SS nous arrêta en demandant notre âge. Nous avons triché en répondant «  18 ans ! » « Links » «  A gauche ! » nous lança-t-il.

Nous étions heureuses d’être restées ensembles. Les familles étaient séparées : les jeunes des vieux, les hommes des femmes, les femmes des enfants. C’était l’affolement : des pleurs, des cris de toutes parts. Les SS n’écoutaient rien et les faisaient avancer avec leur baguette. Nous avons su plus tard, qu’à droite c’était la mort. Il y avait aussi des camions pour ceux qui ne pouvaient pas marcher, même une ambulance ! Tout était prévu pour tromper le monde et que tout se passa dans l’ordre. En cas de panique ou de révolte les SS n’auraient pas été assez nombreux pour arrêter cette foule. Il fallait rassurer ces pauvres malheureux exténué après des jours de transport horrible. J’ai appris plus tard que mon cousin de 24 ans, Pierre, pensant que c’était la planque s’était rué pour monter dans le camion. Il est allé directement à la chambre à gaz pour être assassiné

Nous nous sommes retrouvées ensuite dans un baraquement à courant d’air. Nous nous sommes déshabillées, toutes nues devant les SS. C’était la première fois que nous nous mettions nu devant des hommes. Nous avons décliné nos noms, nos adresses, dates de naissances, professions. Nous avons déclaré «  couturières ». Une femme nous a tatoué notre numéro dur le bras gauche avec une plume et de l’encre de chine comme des bêtes.

J’avais une plaie sous le sein, une femme a eu pitié de moi et m’a apporté du talc, quel soulagement ! Nous avons pu donner nos vêtements, passer à la douche, une douche glacée pas de savon, pas de serviette pour nous sécher. On nous a lancé des fripes, pas questions de choisir ou de changer si cela n’allait pas, des chaussures disparates qui n’étaient pas à notre taille et qui nous feront tant souffrir. Nous étions méconnaissables. Nous mourrions de soif, pas question de boire, il n’y avait de l’eau nulle part !

En route pour le bloc de quarantaine après cette séance, cahincaha toujours entourées de femmes SS qui nous injuriaient en allemand  de cochons, de peuple maudit, de merde parce que nous n’allions pas assez vite. Poussées dans le bloc sans lumière avec une paillasse pour 5 et plus avec 2 couvertures. Quand les hongroises sont arrivées, pour dormir nous étions emboîtées les unes dans les autres et tête bêche. Cela faisait 4 jours que nous n’avion ni bu, ni mangé enfin une soupe avec une écuelle pour 5. Pas de cuillère, nous buvions ce «  brouet » l’une après l’autre par 2 gorgées, ainsi de suite, jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus, comme des chiens. Nos avons pris le rythme : lever à 5 heures du matin à coups de trique, plier les couvertures, un café-ersatz, il faut affronter le froid de l’appel puis retour dans la baraque sans sortir tout au long de la quarantaine. La soupe à midi et puis plus rien jusqu’au lendemain.

A l’appel toujours par rang de 5, nous nous relayons à tour de rôle pour être devant et que ce ne soit pas toujours la même qui prenne le vant glacial de face. L’appel deux fois par jour, durait des heures, surtout quand le compte n’y était pas. Je regardais le ciel, les nuages venaient-ils de France ? Je pensais à notre maison, à notre jardin, à mas parents. Pendant les longues heures où nous restions enfermées, des anciennes nous initiaient aux pratiques du camp : ne pas boire d’eau qui donnait la dysenterie, ne pas aller à l’infirmerie car il y avait des sélections pour la mort. La fumée de la cheminée provenait du four crématoire où les corps brûlaient.

Tant que nous n’avons pas travaillé, nous n’avions pas beaucoup à manger. Quand les tonneaux de soupe arrivaient, il y avait des batailles épiques, il y en avait aussi pour racler le fond des tonneaux où il y avait quelques pommes de terre, c’était si rare. On aurait

 dit des bêtes.

            De notre bloc en pierre du camp des femmes de Birkenau, nous apercevions la rampe où les convois arrivaient mais aussi les gens qui avançaient péniblement vers la chambre à gaz. Ils ne connaissaient pas encore leur destin. Nous tremblions pour eux. Celles qui avaient été séparées demandaient : où sont passés nos parents ? Au crématoire ! Nous même avions du mal à le croire ! Mais pourtant la nuit, les flammes, la fumée jaillissaient des cheminées sans arrêt.

            Nous recevions une ration de pain pour trois jours pour 5 mais la faim nous tenaillait tellement que nous n’avons pas pu résister à la manger avant la fin du délai. Nous avons décidé qu’à tour de rôle, nous garderions le pain des 5 pour ne pas le dévorer de suite, et rester sans rien les jours suivants. Ensemble nous luttions contre la déchéance. Nous couchions sur le pain, sur nos chaussures crottées pour qu’on ne nous les vole pas ! Nous avons acheté un couteau avec une ration de pain. Imaginez  ce que cela représentait de sacrifices ! Chaque tranche était sous-pesée et passait de mains en mains : combien de grammes de différence ?

            En rang nous allions aux latrines, 25 dos à dos. Nous n’avions ni papier, ni savon pou celles atteintes de diarrhées c’était l’enfer. Au fond, des robinets d’eau inaccessibles, nous étions chassées à coup de matraque. Les poux nous courraient sur la tête. Nous avons été tondues, cela a été un choc. C’était notre dernière  parure. Nous ne nous regardions et nous ne nous reconnaissions plus ! Imaginez-vous mesdemoiselles tondues dans l’instant même ! Comment vous voyez-vous ?

            Mon amie, Maki qui a survécu, rappelait l’autre jour que nous étions tellement crasseuses que nous nous grattions la crasse du dos avec les ongles ! Pourtant nous avons essayé de rester le plus propre possible. Une fois dans ce bloc de quarantaine interdiction d’en sortir. Pierrette Guez, qui était dans un autre bloc avait entendu qu’il y avait des belfortaines. Elle nous a rendu visite. Nous avons été contentes de pouvoir bavarder avec elle.

             La quarantaine est terminée, nous étions en juin 1944. C’était l’horreur : les convois arrivaient nuit et jour de Grèce, de Hongrie, d’Italie de France. La grande extermination des Juifs de Hongrie battait son plein.

            Nous avons été affecté à un travail dans le camp, inutile et sans but si ce n’est de nous affaiblir chaque jour un peu plus. Nous devions transporter des pierres très lourdes d’un endroit à l’autre avec des « tragues » sorte de brancard. Nous avons été occupé à du terrassement, à nettoyer le camp.

            Puis nous avons travaillé hors du camp à Raisko. Nous y avons été accueillies par un groupe de Françaises qui nous ont gâtées. Elles nous appelaient les « petites ». Cela a été notre rayon de soleil même si pou y aller nous étions encadrées par les SS avec leurs féroces chiens. Ces Françaises nous donnaient quelquefois des raves. Il ne fallait pas se faire prendre avec au retour. Il y avait parfois des fouilles avec de graves sanctions. En passant la grille, malgré notre grande fatigue, nous nous redressions, nous avancions au pas cadencé au son rythmé par l’orchestre et oui il y avait un orchestre avec des détenues ! Tout était diaboliquement orchestré. Je pense que même à l’arrivée sur la rampe les gens devaient entendre la musique.

            Nos terrassements ont maintenant le but de creuser des emplacements pour les canons, les Russes approchent, le canon gronde au loin. Le moral remonte : serons-nous bientôt délivrées ? Le jour de Kippour, nous décidons de ne pas boire et de ne pas manger.

 

            Nouveau changement : fin octobre, dans la nuit, des sifflements… Rassemblement de tout le monde, appel général, c’est lugubre. Nous tremblons, vont-ils nous exterminer ? Il faut s’attendre à tout ! Nous sommes maigres, nous avons des boutons, nos pieds sont ouverts, nos jambes enflées. Les SS… que vont-ils faire ? Les cheminées des crématoires crachent le feu. Nous passons les 5 devant le SS, les unes derrière les autres. Ma sœur passe devant moi. Je respire. Gertrude est mis e de côté : nous ne la reverrons plus. Maki a eu très peur ce jour-là : elle avait des boutons du côté du SS qui nous inspectait. Tout d’un coup, il passe de l’autre côté, aussitôt elle change ses vêtements de bras qui couvrent ses boutons. Le SS ne voit rien ! Ouf ! Elle passe la sélection. Les Allemands avaient peur des épidémies.

            Le bruit court : nous partons en  transport, où ? Nul ne le sait. Nous passons à la douche, on nous change nos vêtements. Du pain nous est donné pour le voyage en train : il est interminable : une semaine ! Nous traversons toute l’Allemagne. Imaginez nos souffrances dans ces wagons plombés. Nous finissons par arriver à Bergen-Belsen.

            A Bergen-Belsen des sapins sur la route que nous empruntons de la gare au camp. Quel changement avec Auschwitz où il n’y avait rien, rien que de la boue et des barbelés. Pour le reste ce n’est pas mieux. Nous sommes entassés dans les baraques en bois dans les « coyas » les châlits faits de planches en bois avec une paillasse. Ils sont disposés sur trois étages. Nous sommes jeunes, nous grimpons sur le plus haut pour éviter les coups. A Bergen nous avons été séparées d’Huguette, nous restions 3. Le ravitaillement se fait mal, nous avons faim. Le camp est surpeuplé. L’hiver 44-45 est terrible, nous mourrons de froid. Nous ne travaillons pas.

            En sortant du bloc, nous tombons sur un grillage derrière lequel se trouvent des Françaises dont Denise Lorach, épouse d’un officier prisonnier français, avec son petit garçon. Denise depuis a créé le Musée de la Déportation à Besançon. Nous n’en croyons ni nos yeux ni nos oreilles, un enfant dans le camp !

            Pour notre malheur les femmes SS d’Auschwitz sont arrivées. Il fallait qu’elles s’occupent et fassent du mal. A cause d’elles nous avons du reprendre les appels dans le froid glacé du Nord. Les femmes tombaient comme des mouches. Ils faisaient – 20° ! Pour nous occuper les femmes ne parlaient que cuisine alors que nous mourrions de faim et de froid. Nous ne voyons pas comment nous en sortir.

             Dans cette horreur, une lueur d’espoir : des industriels viennent chercher la main d’œuvre. Nous nous précipitons dans l’espoir de travailler au chaud et à l’abri. Nous sommes choisies. Quel bonheur ! Quelques jours plus tard, nous partons pour Raguhn. C’est une usine d’armement. Pendant deux mois et demi, nous sommes restées là. Je ne sais pas comment ils ne sont pas aperçus que je faisais du mauvais travail en produisant des écrous faussés. Nous travaillons 12 heures par jour par équipe de nuit ou de jour.

 Nous avions réussi à traverser la plus dur de l’hiver en ayant de quoi manger pour survivre.

            Le dimanche, nous n’arrêtions pas de nous épouiller les cheveux, les vêtements pour faire éclater les lentes. Hélas il y en avait toujours !

             Nous avons réussi à faire la connaissance d’un prisonnier de guerre français travaillent à l’usine. Il  se propose d’envoyer une lettre à nos parents par la Croix Rouge. Pour leur faire savoir que nous sommes en vie. Nous l’adressons à une amie en Suisse.

            Le ravitaillement se dégrade. Nous maigrissons rapidement, certaines en plus avaient la gale. De notre bloc, nous voyons sur la route les civils allemands s’enfuir comme nous en 1940 avec des valises, des charrettes, des vélos. La délivrance doit être proche.

            Nous sommes à nouveau évacuées : nouvelle déception. Nous sommes embarquées après le rassemblement dans des wagons à bestiaux. Nous attendons le train : nous aurions pu nous sauver mais sans argent et vêtues en bagnards nous n’aurions pas été bien loin. Le train avance, s’arrête des heures. Nous ne connaissons pas le nom des agglomérations traversées. C’est la débâcle pour les Allemands. Ils ne savent plus où nous conduire. Tout est bouché ou encerclé. C’est horrible : nous mourrons de faim et de soif.

            Le convoi finit par arriver à Theresienstadt en Tchécoslovaquie. C’est le ghetto modèle du régime nazi qui a été filmé pour sa propagande et montré combien les Juifs sont bien traités. Nous sommes accueillis par du pain blanc jeté par terre par les internés. Nous n’en croyons pas nos yeux !

            Une carte nous est donnée pour retirer notre soupe. Ma sœur se fait voler la sienne. Nous n’avions déjà pas beaucoup à manger, heureusement, il reste la mienne que nous partageons. Maki a des anthrax purulents. Elle est hospitalisée. Je vais la voir. Elle set dans un lit avec des draps blancs, quel luxe soudain ! A son retour en France, elle ira dans un sanatorium. Elle a la tuberculose des os. Elle y restera deux ans mais ne pourra pas avoir d’enfant.

            Mado, ma sœur,  a la diarrhée. Elle a eu un tel choc après le vol. elle délire et n’assimile plus rien. Un docteur l’examine. Elle est emmenée sur un brancard. C’est le typhus. Je pensais qu’elle avait été hospitalisée comme Maki. Je vais la voir. Elle est dans un bunker. C’’est un mouroir avec des contagieux et des agonisants par dizaines. Je suis chassée par l’infirmière qui me dit de ne plus revenir. On me fait sortir.

            Quelle horreur ! Mado a tout supporté, pour en arriver là ! Elle décède le 15 mai 1945, l’Allemagne a capitulé le 8 mai ! Ma petite sœur, si douce qui ne se plaignait jamais. C’est à toi ma petite sœur que je dédie aujourd’hui mon témoignage. Sur le moment, je pense à mes parents. Sont-ils en vie ? J’en suis malade à l’idée qu’ils n’auraient pas eu la lettre envoyée par l’intermédiaire de ce prisonnier de guerre français.

            Nous avons été rapatriés seulement le 3 juin 1945 par avion sanitaire de Pilzen à Lyon. Je suis mise en quarantaine à l’hôpital de Lyon à La Croix Rousse. J’avais toujours la crainte de ne pas revoir mes parents vivants. Je les ai vus pour la première fois du deuxième étage de l’hôpital. Je leur ai dit que je revenais seule, ils savaient déjà Nous n’avons pu nous étreindre qu’une semaine plus tard par crainte de contagion. Nous sanglotions tous les trois…              En sortant de l’hôpital une carte nous a été remise pour nous vêtir. Une carte de rationnement avec des points. Le textile était encore rare. Des amis se sont mis en quatre pour m’habiller correctement.

            J’étais très maigre mais rapidement je suis devenue énorme. La cause principale était due à l’absence de règles depuis mon arrestation. Afin de me réintégrer au plus vite dans la vie, mon père a voulu que je me présente à la session spéciale du bac de septembre 1945. J’ai suivi pour cela des cours de vacances. J’ai en même temps fait un stage aux berceaux avec les nouveaux nés. J’ai aussi aidé mon père au bureau. J’ai réussi mon premier bac puis j’ai fait philo et décroché mon second bac. Les études sont arrêtées là, j’ai appris la sténo dactylo, la comptabilité et travaillé avec mes parents.

            Je n’ai jamais compris pourquoi nous avons été les seules arrêtées du lycée.  Le mari de la directrice était milicien mais nous ne le savions pas tout comme le père d’une camarade de classe de Saint Geniez d’Olt. Heureusement grâce à M. Baas notre correspondant à Rodez, nos parents ont échappé à la mort. Il risquait sa vie et celle de sa famille. Je lui en serai reconnaissante toute ma vie. Que serais-je devenue à mon retour si je n’avais retrouvé mes parents ?

            Je ne sais pas si j’ai réussi à évoquer pour vous tout ce nous avons souffert. Je ne le crois pas car il est impossible de se mettre à notre place. Je ne vous ai pas parlé de toutes les vexations endurées nous réduisant à l’état de bêtes ainsi que de nos chefs de blocs internées comme nous qui étaient pire que certains SS et de bien d’autres choses encore  si difficiles à communiquer mais nous avons gagné car nous sommes vivants. Je me suis mariée, j’ai eu trois enfants, de nombreux petits-enfants. Je vis toujours à Belfort qui m’a vu naître.

 

                                                                         Janine Blum

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Histoire et mémoire

Il s’agit ici d’un travail reposant sur deux socles :

 

• la rencontre entre les classes de 3ème et d’anciens déportés et résistants afin de donner la chance à nos élèves d’entendre des témoins de cette époque qui deviennent de plus en plus rares,

 

• la participation de certains élèves aux commémorations. Loin d’un exercice de figuration aux cérémonies du 11 novembre (armistice de la Première Guerre mondiale), de fin avril (journée nationale de la déportation), du 8 mai (capitulation de l’Allemagne nazie) et du 18 juin (appel du général de Gaulle), certains élèves du collège viennent lire des textes. Ces textes sont choisis ou rédigés par les élèves eux-mêmes aidés de leurs enseignants. L’an dernier, ce travail a été assuré par Mathilde Molinari, Émilie Bernasconi, Andréa Chareun, Julie Merlet et Chloé Louis. Cette année, pour participer à ces commémorations, il suffit d’en informer Mr GUYON, Mr CHAABANI ou Mme BERG.

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COLLEGES DU VAR

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